L’automne commence bien puisqu’avec lui arrive Blackboard, le nouvel album de Fortune, un des rares groupes que nous suivons avec attention depuis 2010. Rencontre avec Lionel Pierres, compositeur et interprète. Artwork Eva Taulois Hello Lionel, peux-tu nous parler du parcours de Fortune ? Hello Deborah, et bien Fortune est né en 2007 avec la sortie d’un premier EP 4 titres chez Disque Primeur. Au début, il s’agissait essentiellement de mon projet solo. Mais déjà Pierre et Hervé m’accompagnaient sur scène. Au fur et à mesure, ils se sont de plus en plus investis dans le projet et Fortune est devenu un groupe. Quant à Vincent, il a intégré le groupe officiellement il y a 2 ans lors d’une cérémonie très solennelle en Géorgie au bord de la Mer Noire (true story !) Avez-vous toujours eu envie de faire de la musique ? Nous avons tous commencé relativement tôt à jouer de la musique, oui. De manière plus ou moins sérieuse. Quels sont les artistes qui vous ont donné envie de monter un groupe et quels sont ceux qui vous inspirent en général ? Nous avons chacun nos influences. Il ne s’agit pas d’un groupe monté à l’adolescence. On a chacun eu nos expériences respectives dans des groupes divers et variés allant du métal à l’abstract hip-hop et les influences qui vont avec. Mais pour le groupe, les influences sont en partie communes. On est tous fans de Bowie, Depeche Mode, Michael Jackson ou les Beatles pour ne citer que les plus grands. Mais en ce qui concerne les influences plus spécifiques liées à notre mode de composition, c’est assez large. Comme Pierre et moi composons en grande partie tous les deux, nos influences prédominent. Ca va de la scène disco/post punk des années 70/80 au r’n’b des années 2000 en passant par la scène indé 90, donc en vrac : A Certain Ratio, Beck, Outkast, Pavement. Et des choses plus actuelles comme MGMT, Phoenix, Frank Ocean. Depuis la naissance du groupe en 2007, comment voyez-vous votre évolution ? La formule live du groupe a été quelque peu modifiée avec l’entrée de Vincent dans le groupe, on a chacun pu se concentrer sur nos instruments respectifs et cela a fait évoluer notre musique et notre façon de l’envisager. Mathieu Amalric avait réalisé votre clip Under The Sun. Que retenez-vous de cette expérience ? Le cinéma est-il aussi une source d’inspiration pour vous ? Oui, complètement. On n’a d’ailleurs pas choisi de travailler avec Mathieu par hasard. On était fans de son jeu d’acteur depuis des années. On aime beaucoup de films dans lesquels il a joué comme ceux des frères Larrieu ou ceux de Desplechin. L’idée pour ce clip était de sortir du côté très graphique de nos précédentes vidéos. Et oui, nous pouvons être influencés par le cinéma, mais on ne pense pas faire une musique très « cinématique » , et nous ne sommes non plus pas d’énormes consommateurs de musique de film. Mais parfois l’influence de certains films comme ceux de Terrence Malick ou Gerry de Gus Van Sant par exemple se ressent dans l’atmosphère contemplative de nos morceaux et dans nos paroles. Nous sommes également influencés par certaines séries, comme Six Feet Under par exemple, qui m’a personnellement beaucoup touchée. Avec qui rêveriez-vous de collaborer ? On n’a pas vraiment ce genre de fantasmes bizarrement… C’est sans doute parce que Fortune est un groupe très « complet », on a chacun un peu touché à tout donc on se suffit à nous-mêmes. On travaille de plus en plus en autarcie. Les seules personnes qui collaborent au nouvel album par exemple sont des proches. Peux-tu nous parler de ce nouveau projet ? Tu veux parler de notre second album ? Le premier album était très axé sur nos influences post punk/disco début 80’s. On bossait essentiellement à partir de grooves basse-batterie et on construisait la chanson autour et de manière assez métronomique. Pour cet album, on a procédé différemment. Sans aller jusqu’à partir de compositions guitare- voix, nous nous sommes beaucoup plus concentrés sur les mélodies et les arrangements. Nous avons privilégié un son plus naturel à tous les niveaux, de la composition à la production. Le spectre des instruments est également plus grand. Il y a des guitares acoustiques et des orgues, par exemple, qui peuvent côtoyer des boites à rythmes ou des synthés numériques . En période de crise du disque, on dit que la scène a pris le pas sur les ventes de disques. Qu’en penses-tu ? Eh bien ce n’est pas simple non plus de tourner ! Nous sommes 5 sur la route avec du matériel, etc. Ça coûte beaucoup d’argent. Et les programmateurs prennent de moins en moins de risques… La crise de la musique justement, tu la vois comment ? L’industrie du disque dans sa globalité est flippée, des maisons de disques aux artistes eux-mêmes. Tout le monde essaye de tirer son épingle du jeu…Une chose est sûre, c’est qu’on ne vend plus de disques. Et les salles de concert remplissent moins, les synchros pub ne rapportent plus autant qu’avant. Bon, certains commencent à voir la lumière au bout du tunnel ! Justement, ce qui sauve le milieu de la musique, c’est qu’il y reste encore beaucoup de passionnés. Va demander à un trader de bosser pour un salaire de misère… Moi je pensais naïvement que l’industrie de la musique, qui a été l’une des premières à être entrée en crise, en sortirait aussi avant tout le monde, mais en fait non. C’est bien plus complexe que ça. Quels sont les projets futurs de Fortune ? Tourner est très important pour nous. Une fois que tu as passé quasiment 2 ans à bosser d’arrache-pied sur un album, tu as absolument envie de le défendre sur scène, d’amener les gens à l’écouter. Et puis on bosse aussi sur de nouveaux projets de clip. Mais ce qui nous prend le plus de temps, c’est d’adapter les morceaux du nouvel album sur scène. Fortune par YannStofer