Nous avons découvert par hasard le travail de l’illustrateur très rock’n roll Geoffrey Beloeil. Retour sur le parcours d’un artiste dont on devrait beaucoup entendre parler. Bonjour Geoffrey, peux-tu nous parler de ton parcours ? Après le bac, j’ai fait une école privée de préparation aux beaux arts à la Colle sur Loup (06) près de ma ville natale dans le sud. C’est une école qui venait d’ouvrir, je ne sais même pas si elle existe encore. L’organisation y était douteuse, mais je n’ai jamais autant appris que là-bas grâce à l’enseignement d’un jeune prof qui sortait des beaux arts de Tournai en Belgique. Suite au refus de ma candidature à l’école d’Agoulème, je suis donc allé étudier aux beaux arts de Tournai en section bande dessinée. L’enseignement y était profondément ennuyeux et le principal intérêt de cette école résidait dans l’échange avec des autres élèves de talent, dont certains sont devenus plus tard connus, comme Jeremy qui cartonne actuellement avec sa BD Barracuda éditée chez Dargaud. Après les Beaux Arts je me suis installé quelque temps à Lille où je suis devenu freelance. J’ai travaillé, et travaille encore, en tant que storyboarder et illustrateur pour le compte d’agences de publicité. Depuis quelques années je vis à Paris, ou j’entends développer mon travail sur mon univers personnel. Qu’est-ce qui t’a donné envie de devenir illustrateur ? Ça s’est imposé à moi dès la 6e, je faisais mes propres bandes dessinées, bien que les personnages, décors, etc. étaient complètement pompés sur Spirou, Tintin ou Barelli. Avec le temps, je me suis rendu compte que c’était la seule activité qui ne m’ennuyait pas et qui me rendait même fier, bien qu’elle inclue une bonne part de solitude, ce que je ne supporte pas forcément tout le temps. Quels sont les artistes qui t’inspirent ? Il serait bien trop long de citer les artistes qui m’inspirent, mais je peux te citer tous azimuts Jean Giraud, Bernie Wrightson, Charles Burns, Daniel Clowes, Peter Bagge, Blutch, Leon Spilliaert, Edward Hopper, Monet, Guy Peellaert, The Cramps, Neil Young,David Lynch, Wim Wenders… bien que je puise aussi énormément mon inspiration des villes où je vis ainsi que du monde de la nuit qui exerce sur moi une certaine fascination. Geoffrey Beloeil On sent l’omniprésence de la musique dans ton travail. Dans quelle mesure t’influence-t-elle et est-elle importante pour toi ? Disons que j’ai pu passer des mois sans dessiner, mais pas un seul jour sans écouter de la musique. Pour autant je ne suis pas un musicien frustré, beaucoup de mes amis me demandent pourquoi je ne me mets pas à tel ou tel instrument. En fait j’ai déjà essayé , quand j’étais ado, ma mère m’avait acheté une super guitare électro acoustique, un ami avait même commencé à m’apprendre les accords et …. ça m’a totalement ennuyé. Une semaine après, je l’ai remise dans sa housse, où elle se trouve toujours. Ce n’est pas mon truc. Je m’approprie la musique pour l’injecter directement dans mon travail, le reste je m’en fiche, je ne me suis jamais comporté en «fan» comme attendre un groupe après un concert ou sauter sur un musicien connu croisé en club. Toutefois, j’aimerais beaucoup collaborer avec certains groupes, notamment pour des affiches de concerts. Quel a été le projet sur lequel tu as préféré travailler ? Mes projets perso de bande dessinée, qui n’ont jamais débouché sur quoi que se soit. Il y a un immense plaisir à s’immerger dans son histoire planche après planche… la bande dessinée demande énormément de temps et d’énergie, et peut vous couper du monde en vous emmenant à la limite de l’autisme, chose que je ne supportais plus du tout et qui m’a poussée à me diriger vers l’illustration plutot que d’essayer de faire une carrière dans la bande dessinée. Malgré tout j’ai souvent l’envie de remonter un projet BD, chose qui arrivera bientôt. Sur quel projet rêverais-tu de travailler ? J’aimerais beaucoup faire des affiches de concerts. Ça n’existe pas vraiment en France , il n’y a pas cette culture , il n’ y a d‘ailleurs presque aucune culture rock, ça se fait surtout pour des groupes «underground» alors que c’est un très gros business aux États-Unis. Ici quelques-uns en font depuis plusieurs années comme les Arrache toi un Oeil desquels je m’étais rapproché pour une éventuelle impression de mes posters. J’étais en relation avec certains groupes aux Etats Unis justement, mais cela s’avérait compliqué. Je compte résoudre ces problèmes techniques cette année. À l’heure du numérique, quelles sont les techniques de travail d’un illustrateur ? Je suis le moins bien placé pour répondre a cette question. Longtemps je n’ai travaillé qu’à la main, notamment à l’aquarelle. Je m’y remets en ce moment. J’avais un peu arrêté et d’ailleurs les 90% de ce que tu vois sur mon site sont dessinés à la main puis colorisés sur Photoshop à la souris… je n’ai pas de palette graphique et je ne sais absolument pas me servir d’illustrator. Je vois surtout l’ordinateur comme un super instrument complémentaire que j’aimerais approfondir et qui facilite souvent la vie. Il y a plein de très bons digital artists mais par contre, je n’ai jamais été convaincu par la peinture numérique. Elle copie le grain ou les textures d’un vrai papier et de la vraie peinture manuelle ce qui donne souvent des résultats très impressionnants, mais bien trop froids dans leur perfection obtenue à coups de ctrl z. Geoffrey Beloeil Tu travailles pour la presse, plus particulièrement pour Mojo. Penses-tu que la presse soit un passage obligé pour un illustrateur ? Mojo , ça été un vrai plaisir de travailler pour eux, car ça concordait avec mon travail personnel. D’ailleurs, la presse c’est plus pour la gloire que la fortune, car c’est 10 fois moins bien payé que la publicité. Mais ça offre une visibilité non négligeable et un certain «standing» sur ton cv. Toutefois avec l’expansion des réseaux sociaux, des sites web dédiés à l’art et des plateformes de vente en ligne, je ne pense pas que la presse soit encore indispensable pour se faire connaitre et se constituer un public. L’écriture d’une BD est-elle une expérience que tu as envie de renouveler ? J’ai fait ça il y a quelques années. À cette époque avec mes amis des beaux arts on se rendait chaque année au festival d’Angoulême pour présenter nos projets aux éditeurs. Rien n’aboutissait et avec le recul il est clair que c’était justifié. Las de ces refus, mes amis ont monté leur collectif Croc en Jambe avec lequel ils auto éditaient leurs bandes dessinées reliées à la main et parcouraient les festivals à travers la France pour les vendre. Je me suis greffé à ce projet quelque temps avec ma bande dessinée «Impulsion», on a été invité plusieurs fois aux festivals d’Angoulême, d’Ajaccio, de Saint Malo…. Ce fut une très bonne expérience. Quels sont tes projets pour 2013 ? Je vais ouvrir ma boutique web avec des impressions de qualité, des originaux, de nouveaux t-shirts… Travailler sur mon projet d’affiches de concert pour des groupes d’outre-Atlantique et évidemment trouver plein de contrats qui m’apporteront gloire ET fortune. Pour finir, à quand une illustration de la team Spanky Few ? 😉 Bientôt , promis ! Geoffrey Beloeil Geoffrey Beloeil Geoffrey Beloeil Geoffrey Beloeil Geoffrey Beloeil Geoffrey Beloeil Geoffrey Beloeil